Les données ci-dessous correspondent aux règles en vigueur au 1er janvier 2021.
La fiscalité « Malraux »
La fiscalité « Malraux » est une réduction d’impôts calculée sur un montant des travaux éligibles de 400 000€ sur lequel s’applique un taux de réduction d’impôt de 22 ou 30%.
Ce principe de réduction d’impôts s’applique pour les sites patrimoniaux remarquables pour effectuer des travaux visant à restaurer intégralement un immeuble ou à en achever la restauration. Les logements restaurés doivent être loués 9 années nus, au titre de résidence principale. Il n’y a pas de plafond de loyer ni de ressources du locataire, sauf si l’opérateur a sollicité des aides de l’Anah. Cette fiscalité permet de restaurer des logements mais aussi des commerces. Dans ce dernier cas, seuls les travaux portant sur les parties communes ouvrent droit à une défiscalisation.
Qui est éligible ?
La loi de finances rectificative n° 2016–1918 du 29 décembre 2016 en son article 40 a apporté des modifications à la fiscalité « Malraux » (article 199 tervicies du code général des impôts).
1. Les sites patrimoniaux remarquables sont éligibles dès leur création.
Le taux applicable pour calculer la réduction d’impôts est de 22% dans les SPR, soit le même que celui des AVAP et des ZPPAUP : 22%.
Désormais les plans de sauvegarde et de mise en valeur mis à l’étude ne bénéficient que du taux de 22 %, ce qui est inférieur à ce qui leur était jusqu’alors accordé. Ce n’est qu’après leur approbation qu’ils pourront retrouver le taux de 30 %. Nous avions pourtant obtenu, par amendement de la loi LCAP, le maintien du taux le plus favorable dès la décision de mettre en place un plan de sauvegarde et de mise valeur.
- Les restaurations à réaliser sont soumises, au préalable, à déclaration d’utilité publique (DUP) sauf dans les plans de sauvegarde et de mise en valeur ou dans les plans de valorisation de l’architecture et du patrimoine approuvés.
- Le montant des dépenses retenu qui était de 100 000 € par an pendant 4 années maximum est remplacé par une dépense globale de 400 000 €, somme répartie selon la réalité du déroulé de la restauration toujours sur une durée maximum de 4 années.
- Les locaux autres que l’habitation sont éligibles à la fiscalité « Malraux » s’ils sont transformés en logements même si leur destination d’origine n’était pas du logement (cas des banques, postes, hôpitaux, commerces…).
2. Les secteurs inscrits dans le Programme National de Requalification des Quartiers Anciens Dégradé (PNRQAD) bénéficient de l’avantage Malraux à hauteur de 30% avec DUP, et ce jusqu’au 31 décembre 2022.
Principaux textes de référence
Lois :
Loi de finances rectificative n° 2016–1918 du 29 décembre 2016 pour les nouvelles dispositions à compter de 2017.
Loi engagement national pour le logement du 13 juillet 2006, n° 2006–872 et le décret n° 2008–1338 du 16 décembre 2008 pour la vente d’immeubles à rénover.
Code général des impôts :
Articles 31, 156 et 199 tervicies pour les réductions d’impôts
Article 257 I.-2. 2° pour l’application de la TVA à taux moyen ou à taux plein selon la nature des travaux de restauration.
Code de la construction et de l’habitation :
Article L262‑1 à L262-11 pour la vente d’immeuble à rénover (VIR)
Bulletin officiel des impôts :
BOI-IR-RICI-200–10-20160526 relatif à la « réduction d’impôt accordée au titre des dépenses de restauration immobilière dans les secteurs sauvegardés, les quartiers anciens dégradés et les zones protégées ».
Des évolutions souhaitables
par Jacky CRUCHON, expert urbaniste chez Sites & Cités remarquables de France
Depuis de nombreuses années Sites et Cités remarquables de France demande que l’outil fiscal « Malraux » soit au service des politiques locales de l’habitat. Pour ce faire, les évolutions suivantes sont attendues :
1. Orientation du dispositif
Les villes qui mènent une politique de reconquête des quartiers anciens doivent relever le défi de la production de logements de qualité (valeurs patrimoniales, culturelles, typologiques), concurrentiels économiquement (le coût global des opérations, le niveau des loyers), performants en matière environnementale (adaptation des techniques de restauration aux particularités du bâti traditionnel), et mener aussi une lutte contre l’insalubrité par restructuration de certains îlots. L’ampleur de la tâche est immense et très onéreuse. Aussi faut-il concentrer, au sein des sites patrimoniaux remarquables, les dispositifs les plus performants dont fait partie le « Malraux ». En concertation avec les services de l’Etat, il conviendrait d’orienter cette fiscalité vers les îlots les plus difficiles à traiter, augmenter les taux de défiscalisation dans ces « points durs » et réserver les taux actuels et les aides classiques comme les déficits fonciers pour des îlots moins « durs ». Cette démarche pourrait s’appliquer, selon l’analyse effectuée, sur tout ou partie du site patrimonial remarquable.
2. Orientation sociale du dispositif fiscal
Les besoins de mixité sociale des quartiers anciens font appel à une politique fine du logement dont la définition devrait être un préalable pour le recours aux divers outils juridiques, financiers ou opérationnels au service des politiques locales. Dans ce cadre le dispositif « Malraux » devrait être modulé, proportionnellement à l’effort que fait le propriétaire en matière de loyer.
3. Unicité des procédures
Dans la continuité de l’orientation attendue du dispositif il serait logique et nécessaire que pour toute opération souhaitant être éligible, le préalable soit la Déclaration d’Utilité Publique (DUP) ce qui permet de vérifier que l’objet des travaux correspond bien aux besoins de la collectivité et à la protection du patrimoine. Par ailleurs cette fiscalité est contestée, taxée de « niche fiscale » voire « d’optimisation fiscale », en permanence fragilisée, et les tentations de remise en cause sont grandes. Affirmer que son utilisation correspond à une utilité publique justifie son caractère d’exception fiscale.
4. Unicité des taux
L’orientation du dispositif vers les points « durs » et le recours systématique à la déclaration d’utilité publique ne justifieraient plus un taux de réduction d’impôts différent. Et ce d’autant que la déclaration d’utilité publique peut, dans tous les cas de figure, porter aussi sur les travaux intérieurs.
5. Réforme de la VIR
L’intérêt de la vente d’immeuble à rénover tant pour la collectivité que pour l’investisseur réside dans le fait que l’opérateur fournit une garantie extrinsèque d’achèvement. Cette garantie est apportée par une banque ou une assurance. Mais si en application de l’article 257 I.-2. 2° du code général des impôts qui traite de la TVA, l’immeuble est requalifié en « immeuble neuf » (Cf. power point « Logements, les principaux leviers financiers »), l’opération de VIR est requalifiée en vente en état futur d’achèvement (VEFA) qui n’est pas compatible avec la fiscalité « Malraux ». Il est nécessaire soit d’accepter que VEFA et fiscalité « Malraux » soient compatibles, soit de revoir les critères de travaux qui requalifient la restauration « d’immeuble neuf », mais cette dernière option ne relève pas tant d’une réforme de la VIR que de la TVA.
La fiscalité « Pinel »
Le dispositif « Pinel » qui a succédé au dispositif « Duflot » s’adresse aussi aux opérations en acquisition-amélioration pour restaurer des logements non conformes aux normes de décence, et pour atteindre un niveau de performance en matière de consommation d’énergie. Ce dispositif concerne des territoires réputés tendus. Les logements restaurés doivent être loués 6, 9 ou 12 années nus, au titre de résidence principale. La durée de location conditionne l’avantage fiscal. Il y a un plafond de loyer et de ressources du locataire. Cette fiscalité s’adresse à des revenus moyens-supérieurs et n’est pas cumulable avec les aides de l’Anah ni avec la fiscalité « Malraux ».
Principaux textes de référence
Lois :
Loi n° 2017–1837 de finances pour 2018 en son article 68 modifie le dispositif en le concentrant sur les « zones tendues ». Loi n° 89–462 du 6 juillet 1989 qui en son article 6 définit les conditions de décence à atteindre pour restaurer des logements en bénéficiant du dispositif « Pinel ».
Code général des impôts :
Article 199 novovicies pour le mécanisme fiscal. Article 200–0 A pour le plafonnement des « niches fiscales ». Annexe III : article 2 terdecies D pour les plafonds de loyers et de ressources des locataires.
Décrets :
Décret n°2002–120 du 30 janvier 2002 modifié par le décret n° 2017-312 du 9 mars 2017 précisant les conditions de décence d’un logement. Décret n° 2017–761 du 4 mai 2017 « relatif à l’agrément et au classement des communes pour l’application du quatrième alinéa du IV de l’article 199 novovicies du code général des impôts et à l’actualisation pour l’année 2017 des plafonds de loyer et de ressources des locataires prévus pour l’application du III du même article ».
Bulletin officiel des impôts :
Des évolutions souhaitables
par Jacky CRUCHON, expert urbaniste chez Sites & Cités remarquables de France
Au regard de l’importance de la reconquête des logements dans les centres anciens et en particulier dans les quartiers protégés, la première des évolutions est la stabilité et la lisibilité.
La deuxième évolution attendue est que les SPR soient systématiquement éligibles au dispositif Pinel. Cela rejoint la remarque formulée pour le dispositif « Malraux » : il faut concentrer, au sein des sites patrimoniaux remarquables, les dispositifs fiscaux disponibles en les renforçant par rapport au droit commun. En concertation avec les services de l’Etat, il conviendrait d’orienter cette fiscalité de plein droit dans les sites patrimoniaux remarquables, quelle que soit la zone, sans passer par la procédure d’agrément, vers les îlots les plus difficiles à traiter, identifiés après enquête publique.
De plus, au regard des coûts de restauration et de requalification des logements dans ces « points durs », il est aussi nécessaire pour ces opérations de relever le plafonnement global des avantages fiscaux à 18 000 € (au lieu de 10 000 €), comme cela existe pour les investissements outre-mer et/ou dans le cinéma.
La troisième évolution est relative au calcul de la performance énergétique demandée (label BBC rénovation). Les études menées par le CEREMA de Strasbourg, des associations et des thermiciens ont montré la non adéquation des logiciels de calcul dits conventionnels pour évaluer les besoins en énergie des bâtiments anciens édifiés selon des systèmes constructifs traditionnels (pierre, terre, bois…). Le seul outil capable d’analyser leur comportement est la simulation thermique dynamique (STD). Cet outil doit être reconnu en lieu et place de ceux demandés par les textes en vigueur.