LES COMMERCES EN CENTRE ANCIEN
Le phénomène de vacance commerciale touche de plus en plus les centres villes et notamment les villes moyennes. Contexte socio-économique défavorable, population résidente qui se paupérise, pression foncière, concurrence commerciale de la périphérie, perte en équipements et services et nouveaux modes de consommation, sont autant de facteurs qui participent à la dévitalisation commerciale des centres anciens.
Or, une des caractéristiques d’un centre ancien dynamique est l’offre commerciale qu’il propose. Associée à d’autres éléments, tels qu’une offre en logements variée, une accessibilité au centre-ville facile et des espaces publics de qualité, une offre commerciale adaptée aux enjeux et besoins actuels fait des centres anciens des quartiers attractifs. En cohérence avec les objectifs du site patrimonial remarquable, le traitement du commerce et de son enseigne est déjà un indice de la qualité de l’offre.
Penser une stratégie de revitalisation commerciale d’un centre ancien amène à élaborer un projet de ville global, transversal et surtout pensé à l’échelle du territoire. Le commerce est avant tout une affaire de professionnels mais qui dépend beaucoup de l’écrin que constitue la ville. La loi n° 2014–626 du 18 juin 2014 relative à l’artisanat, au commerce et aux très petites entreprises (loi ACTPE) va dans ce sens et renforce la place du commerce dans l’urbanisme en créant notamment le permis de construire unique tenant lieu d’autorisation d’exploitation commerciale. Elle a également transformé le FISAC en un appel à projet. De fait, seuls les « bons » projets sont à même de mobiliser des financements pour enclencher cette dynamique.
Ainsi, une stratégie globale doit être construite avec les commerçants, sur une échelle de territoire qui est leur zone de chalandise mais aussi les communes et particulièrement les intercommunalités qui sont les acteurs incontournables d’un projet de revitalisation.
Sites & Cités remarquables de France réunit depuis 2012 le groupe de travail « Dynamiques économiques et urbanisme commercial » pour rechercher les moyens d’équilibrer les dynamiques commerciales entre centre-ville et périphérie et d’inclure le commerce dans les stratégies d’aménagement du territoire. Ce groupe de travail, mené en partenariat avec la Caisse des Dépôts, rassemble des élus et techniciens des collectivités, des professionnels, des experts et représentants associatifs. Il a pour objectif, à travers différents ateliers, de permettre aux membres du réseau de l’association d’échanger leurs bonnes pratiques et exemples de démarches menées sur différents territoires, tout en s’informant sur les outils et dispositifs pour la revitalisation commerciale des cœurs historiques.
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Afin de développer une stratégie globale pour le territoire prenant en compte le commerce au même titre que l’habitat ou les déplacements, il est indispensable que les collectivités puissent intégrer la dimension commerciale dans leurs documents d’urbanisme et de planification. La loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et un urbanisme rénové (loi ALUR) affirme que les dispositions d’aménagement et d’urbanisme commercial doivent être mentionnées dans les SCoT et PLU mais supprime les Documents d’Aménagements Commerciaux (DAC) qui pouvaient être source d’instabilité juridique pour l’ensemble du SCoT. La loi ACTPE complète le démarche en introduisant dans le DOO du SCoT le Document d’Aménagement Artisanal et Commercial (DAAC). Ce document détermine les conditions d’implantation des équipements commerciaux qui, du fait de leur importance, sont susceptibles d’avoir un impact significatif sur l’aménagement du territoire et le développement durable. Le DAAC localise, sans tracé à la parcelle, les secteurs d’implantation périphérique ainsi que les centralités urbaines et peut prévoir des conditions d’implantation spécifiques.
Toutefois, la question de l’aménagement commercial est sensible et pour éviter une chute contentieuse de tout le SCoT, le juge peut procéder à une annulation partielle n’impactant que le DAAC. De nombreuses jurisprudences précisent la portée possible de ces documents pour lesquels ils doit exister une absence de disproportion de la mesure et un motif d’urbanisme. Ces conditions établies, ce document constitue un premier élément important de l’urbanisme commercial dans le cadre d’une stratégie de rééquilibrage entre commerce de périphérie et commerce de centre-ville.
Le PLU permet également d’intégrer la question du commerce. En l’absence de SCoT, les mesures relatives au commerce sont insérées dans les Orientations d’Aménagement et de Programmation du PLU.
De plus, le règlement du PLU prévoit la possibilité d’identifier des quartiers, îlots ou voies pour lesquels doit être préservée ou développée la diversité commerciale, notamment le commerce de détail ou de proximité, et d’indiquer des prescriptions correspondantes. De même, l’article L‑121–1 permet de préserver les linéaires commerciaux en interdisant les changements de destination du commerce et de l’artisanat vers une autre activité. Dans ces cas, les mêmes conditions de non disproportion de la mesure et de motif d’urbanisme s’appliquent. L’intégration des questions commerciales dans les documents d’urbanisme est primordiale car le permis de construire valant aujourd’hui autorisation d’exploitation commerciale doit être compatible avec le SCoT et le PLU.
Sites & Cités remarquables de France développe une réflexion sur l’intégration du commerce dans les documents de planification des centres anciens et de leurs bassins de vie afin de participer à leur dynamique globale.
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L’article 58 de la loi du 2 août 2005 en faveur des petites et moyennes entreprises (PME), dite loi Dutreil et son décret d’application du 26 décembre 2007 créent un droit de préemption des communes sur les fonds de commerce, artisanaux et les baux commerciaux. Les communes peuvent ainsi s’en porter acquéreurs à l’occasion de leur cession. L’objectif est la préservation d’une offre commerciale diversifiée dans les centres villes et les quartiers animés. La loi de modernisation de l’économie (LME) du 4 août 2008 a étendu ce droit de préemption à des cessions de terrain (compris entre 300 et 1 000 m²) faisant l’objet de projets d’aménagement commercial. La loi du 22 mars 2012 autorise le recours à la location-gérance et la loi ACTPE a porté à 3 ans le délai dont dispose la commune pour trouver un repreneur.
Suite à la loi ACTPE, le décret n° 2015–815 du 3 juillet 2015 relatif à la procédure d’attribution des contrats de revitalisation artisanale et commerciale (Crac) prévus à titre expérimental jusqu’en juin 2019, permettent aux collectivités territoriales qui souhaitent redynamiser le commerce et l’artisanat, notamment dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville, de désigner un opérateur chargé de développer des activités commerciales dans un périmètre défini. Cet opérateur peut acquérir les biens nécessaires, y compris par préemption ou expropriation sur les fonds artisanaux, les fonds de commerce, les baux commerciaux et certains terrains faisant l’objet de projets d’aménagement commercial.
La délégation du droit de préemption des communes à leur intercommunalité résulte d’une délibération du conseil municipal. Le titulaire du droit de préemption peut ensuite déléguer ce droit à un établissement public y ayant vocation, à une société d’économie mixte, au concessionnaire d’une opération d’aménagement ou au titulaire d’un Crac. Là encore une délibération du conseil municipal ou, le cas échéant, de l’organe délibérant de l’EPCI délégataire est requise.
Avant toute action de préemption par la commune, le conseil municipal doit délimiter un périmètre de préemption justifié sur la base d’un rapport d’analyse du commerce.
De nombreuses villes du réseau de Sites & Cités ont délibéré pour délimiter un périmètre d’intervention et tenter de conforter les commerces de proximité et l’artisanat dans les cœurs de villes. Cependant, il est important de noter les difficultés auxquelles sont confrontées les collectivités :
- Le portage financier qui peut être important pour une collectivité, il peut être risqué en l’absence d’un repreneur souhaité et le commerce ne se « décrète » pas ;
- Le droit de préemption commercial s’exerce sur la cession de baux et non sur la création de baux commerciaux.
Dans le cadre du groupe de travail « Dynamiques économiques et urbanisme commercial », Sites & Cités rassemble les expériences innovantes des collectivités dans le champ de la préemption commerciale et leur permet d’échanger sur leurs difficultés mais aussi sur les leviers identifiés.